Quand les Révolutions touchent au but
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fichier : 03 - Les crépuscules des dogmes
Fruit d'une dynamique de pouvoirs complexe associant un souverain tout-puissant et un parlement docile mais
doté de compétences bien réelles, la séparation accusa le caractère absolutiste de la monarchie en même temps qu'elle consacra la montée en puissance de l'institution parlementaire.
Partisan convaincu de l'absolutisme de droit divin, Jacques Ier veut renforcer son pouvoir en prenant appui sur la religion anglicane, qui fait du roi le chef de l'église nationale. Il en vient à
persécuter les catholiques et les puritains. Ces derniers commencent à émigrer en masse vers le Nouveau Monde. Par la conspiration des poudres, les catholiques, quant à eux, tentent mais en vain
de se débarrasser du roi.
Sous le règne de Charles Ier, la bourgeoisie anglaise s’enrichit et contrôle le parlement, qui s’oppose au pouvoir absolu du roi. La noblesse, pour sa part, voit son pouvoir affaibli par la
guerre des Deux Roses et se retrouve sans privilège juridique concret. C’est pourquoi elle délaisse son rôle traditionnel pour se lancer dans l’activité commerciale. La relance du mouvement des «
enclosures » est représentatif de cette tendance : afin de pratiquer l’élevage commercial, les propriétaires terriens ferment l’accès des terrains communaux, mettant ainsi fin à une tradition
millénaire. Or, en clôturant les terrains, ils condamnent des milliers de paysans à la famine.
Des idéologies Egalitaires se développent et menacent le pouvoir de la bourgeoisie du parlement : l’antinomianisme (idée selon laquelle la grâce divine est offerte de façon inconditionnelle, ce
qui exclut toute notion de péché ainsi que toute justification des inégalités sociales et du pouvoir exercé par quelques-uns sur les autres) se répand rapidement au XVIIè siècle.
Pour contrer cette Révolution Egalitariste, l’élite anglaise élabore la « convenant theology » (théologie convenable). En vertu de cette doctrine, la relation entre dieu et l’élu consiste en une
sorte d’échange : dieu se charge du salut des humains, les humains se chargent d’appliquer sur terre sa loi. Cette doctrine présente l’avantage de concilier le rôle de la volonté humaine et la
toute puissance divine. La « convenant theology » convient fort bien à la bourgeoisie anglaise, car elle offre la justification d’une inégalité sociale par le fruit d’un honnête travail. La
bourgeoisie anglaise a donc le droit d’exister, de s’enrichir et de gouverner au parlement avec la sanction de dieu. Toutefois, pour que la bourgeoisie puisse jouir de ces privilèges, le pouvoir
absolutiste du roi doit être aboli. C’est d’ailleurs ce refus de l’absolutisme qui est l’objet de la guerre civile de 1642 et de la Glorieuse Révolution de 1688.
De 1640 à 1660, un Soulèvement populaire, politique et religieux, anglais et écossais, se bat contre la
monarchie, le roi, les nobles et le clergé anglican.
La Première Révolution Anglaise (appelée English Civil War par les historiens britanniques), aboutit à la mise en jugement du roi Charles Ier d'Angleterre puis à sa décapitation le 30 janvier
1649 à Whitehall près de Westminster et à l'établissement d'une république, le Commonwealth (richesse, opulence commune) qui durera jusqu'en 1660, date de la restauration monarchique.
La Révolution est religieuse : la cause royale se confond vite avec le maintien de l'église anglicane, la Révolution avec la refonte totale des communautés. Une seule Réforme en trois siècles :
au schisme du
XVIè siècle, les années médianes du XVIIè siècle superposent leur immense espérance bafouée d'un monde conforme à la Parole ; d'aucuns attendent même le retour imminent de Jésus-Christ, tandis
que certains, songeurs, se prennent à rêver à un monde d'Egalité sociale et de Partage.
Une Révolte écossaise contre Charles Ier met le feu aux poudres, une Insurrection irlandaise et la grande peur qui s'ensuit rythment l'événement. Enfin, la pacification des trois royaumes,
d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande, sera le fondement de l'ascendant cromwellien.
Depuis 1601, un même roi règne sur l'Angleterre, le Pays de Galle et l'Ecosse. Toutefois, l'Ecosse et
l'Angleterre étaient toujours deux royaumes distincts, disposant chacun d'un parlement propre. Charles Ier, roi depuis 1626, désire réaliser le rêve de son père Jacques
Stuart : unifier l'Angleterre, l'Écosse et l'Irlande dans un même royaume. Ces aspirations inquiètent certains Anglais qui craignent pour leurs Droits. En effet, Charles, comme son père, se
réclame du droit divin et accepte mal les limites que la tradition impose au roi d'Angleterre. D'autres événements contribuent à tendre la situation. En 1625, Charles épouse Henriette-Marie de
Bourbon, une catholique, française de surcroit.
Cette Révolution qui, de 1640 à 1660, provoqua en Angleterre, en Écosse et en Irlande la chute de la
monarchie des Stuarts et l'avènement d'une république, pour aboutir à l'établissement d'une dictature et, finalement, à la restauration de la royauté, est une des grandes ruptures de l'histoire
moderne de l'Europe. Les comparaisons avec la Révolution française, postérieure d'un siècle et demi, s'imposent à la réflexion historique, d'autant plus que le rôle de Cromwell, à bien des
égards, préfigure celui de Bonaparte.
Comme les autres pays d'Europe occidentale, l'Angleterre et l'Écosse, vers 1630-1640, sont agitées de profonds conflits, qui marquent le douloureux passage de la rigide société féodale, ou de ce
qui en reste, à la société d'échanges qui caractérisera les siècles suivants. Ces conflits, nombreux et souvent contradictoires, éclatent surtout sur deux points : la religion et la nature du
pouvoir politique, l'un et l'autre étant d'ailleurs étroitement liés. Encore faut-il ne pas transposer au XVIIè siècle des notions du XXIè, qui seraient anachroniques. Des mots comme « Liberté »,
« ordre » ou « autorité » n'ont pas alors le même sens qu'aujourd'hui ; moins encore, le sens des hiérarchies sociales. Le contraste entre anciennes et nouvelles notions est précisément à
l'origine du drame de 1649, de ses prémices et de ses conséquences.
La supériorité de la flotte anglaise avait rendu possible un commerce maritime très important au début du XVIIè siècle, et l'industrie du textile s'apprêtait à dépasser celles des Pays-Bas et du
Nord de la France. La bourgeoisie anglaise avait littéralement le vent en poupe, et pourtant le roi la dédaignait, ne lui accordait aucun Droit politique.
Charles Ier, né en 1600, est en quelque sorte prédestiné à incarner, dans sa personne, les contradictions de
son époque. Son père, Jacques Ier Stuart (1566-1625), roi d'Écosse pendant trente-six ans avant de devenir roi d'Angleterre en 1603, était le théoricien le plus convaincu du « droit divin » :
pour lui, l'autorité du roi découle de dieu seul ; les sujets sont tenus à l'obéissance, et toute Rébellion, toute Contestation même, est sacrilège, puisque contraire à l'ordre établi par dieu.
C'est ce qu'il appelle, dans un ouvrage au grand retentissement, « la vraie loi des monarchies libres ». Charles Ier hérite de son père cette conception, qui n'a alors rien d'extraordinaire :
c'est celle d’Henri IV en Espagne ; ce sera celle de Louis XIV et des autres souverains européens jusqu'à l'ère des Lumières.
Mais, à cette conception de droit divin s'opposent, avec une force croissante dans la première moitié du
XVIIè siècle, deux autres principes, l'un et l'autre explosifs dans leurs implications
pratiques : celui du droit supérieur de dieu, c'est-à-dire de la conscience (l'obéissance à dieu passe avant l'obéissance au roi), et celui du Droit du Peuple à Résister à la tyrannie (reconnu en
Angleterre par la Grande Charte, la Magna Carta depuis 1215).
Pour Charles Ier, roi légitime, sacré et oint de l'huile sainte lors de son couronnement, son droit divin ne fait et ne fera jamais aucun doute. En tant que « gouverneur suprême de l'église
d'Angleterre », titre hérité d'Élisabeth Ière (1533-1603), il ne reconnaît aucune autorité supérieure à la sienne en matière de religion. Il est profondément croyant dans le cadre de cette église
anglicane, qui est issue de la Réforme protestante mais conserve bien des traits par lesquels elle reste apparentée à l'église catholique : hiérarchie de prêtres, doyens, chanoines, évêques,
archevêques ; liturgie spectaculaire avec cierges, ornements brodés, calices et ciboires d'or ; et surtout, stricte discipline, à laquelle veille le rigide archevêque de Cantorbéry, William
Laud.
Sur le plan politique, Charles Ier est persuadé d'agir toujours en conformité avec ses devoirs de souverain chrétien. Ses conseillers (d'abord le duc de Buckingham, son ami d'enfance, assassiné
en 1628, puis l'archevêque Laud et, à partir de 1629, l'autoritaire et compétent Thomas Wentworth, devenu en 1640 comte de Straford) le poussent à réagir fermement contre les oppositions,
religieuses et politiques, qui se multiplient dès le début du règne.
La théorie du droit divin se traduit, en Angleterre, par la « prérogative royale », expression qu'on pourrait
rendre, en termes constitutionnels modernes, par « domaine réservé », assurant au monarque l'autorité entière dans divers domaines, dont la politique étrangère et la défense nationale. Cette «
prérogative », Charles Ier entend l'exercer pleinement.
Or, l'Angleterre connaît, depuis le Moyen Âge, un système de contre-pouvoir incarné par le Parlement. Face à la « prérogative royale » s'affirme le « privilège du Parlement », dont les deux
fleurons sont le droit exclusif de voter les impôts et la Liberté d'expression pendant les sessions. Avec un souverain autoritaire comme Charles Ier, le conflit est inévitable.
Dès le début du règne, en 1625, le malentendu éclate : le Parlement entend contrôler l'utilisation des crédits votés, le roi s'y refuse absolument ; le Parlement est dissous, les députés renvoyés
chez eux. À partir de ce moment, plus une année ne se passera sans conflit entre les deux conceptions du pouvoir. Peu à peu se forme une opposition organisée au gouvernement royal, dont les chefs
sont des bourgeois régulièrement élus au Parlement, John Eliot (1592-1632), John Pym (1584-1643) et John Hampden (1595-1643).
En 1627, le favori du roi, le duc de Buckingham échoue lors d'une expédition destinée à rompre le siège de la Rochelle, le Parlement entreprend alors contre lui une procédure d'impeachment
(d’éviction du pouvoir, bref de licenciement). Le roi répond par la dissolution du Parlement. Le nouveau Parlement lui demande de signer la Petition of Right. Charles accepte car il a besoin du
soutien du Parlement pour pouvoir lever de nouveaux impôts.
Dans l'Angleterre et l'Écosse du XVIIè siècle, le point sur lequel se cristallise le débat politique est la religion. L'autorité de l'église anglicane, étroitement liée à celle du roi (« pas
d'évêque, pas de roi », disait Jacques Ier), est rejetée avec une obstination croissante par les calvinistes, qui veulent le retour à une église plus austère, plus « pure », d'où leur nom de «
puritains ». En Écosse, les calvinistes dominent l'église nationale, dite « presbytérienne », entièrement Indépendante de celle d'Angleterre. En Angleterre, les puritains accusent Charles de
vouloir rétablir le catholicisme.
Puritains et presbytériens sont les bêtes noires de Laud et de Charles Ier, et les sanctions contre les pasteurs Rebelles se multiplient. Avec une rare maladresse, l'archevêque durcit ses
positions vers 1630. Il impose la stricte observance du livre de prière anglican, cible principale des critiques puritaines. C'est surtout avec l'Écosse que le conflit s'envenime. Laud pousse
Charles Ier à imposer aux rudes presbytériens la hiérarchie épiscopale et la liturgie anglicane. En résultent une Emeute, qui éclate à Édimbourg le 23 juillet 1637, puis la constitution d'une
ligue, ou Covenant, à laquelle les Écossais adhèrent en masse pour défendre leur Liberté de conscience. Charles Ier réagit conformément à son caractère : il déclare le Covenant illégal et se
prépare à rétablir son autorité par la force. Ce sera la « guerre des évêques », qui marque le début de la Révolution en août 1640.
Mais, dans l'Angleterre bouillonnante des années 1630-1640, anglicans et puritains ne sont pas seuls. Les catholiques, persécutés depuis Élisabeth Ière, exclus par la loi de la fonction publique,
sont protégés par la reine Henriette-Marie, sœur de Louis XIII, qui est française. Surtout, de plus en plus de croyants « Indépendants » ne veulent obéir qu'à leur propre conscience et refusent
toute autorité ecclésiastique. Les sectes se multiplient, qui aux yeux du roi Charles et de ses conseillers mènent le pays à l'Anarchie (autant dans le sens d’absence de chef que de
désordre).
Pour faire la guerre aux Écossais, il faut de l'argent ; or seul le Parlement peut voter les crédits
nécessaires. Le roi Jacques Ier, lors de son accession au trône, hérita déjà de dettes royales énormes, malgré la politique restrictive d'Elisabeth I.
Depuis neuf ans, Charles Ier s'est arrangé pour gouverner sans Parlement (la convocation et la dissolution de l'assemblée faisant partie de la fameuse prérogative) en ayant recours à des
expédients financiers, emprunts forcés, taxes diverses, dont la légalité est contestée par de nombreux juristes et contribuables. Ces procédés ne sont pas illégaux en soit mais sont perçus comme
contraires à l'esprit de la tradition, et ils entretiennent des rancœurs.
Dans ces conditions, le Parlement convoqué pour financer les opérations militaires en Écosse, qui se réunit le 18 avril 1640, est mort-né : il est dissous dix-sept jours plus tard, sans que rien
ne soit voté. Cependant, la campagne, engagée à la fin de l'été, tourne mal pour le
roi : les Écossais du Covenant entrent en Angleterre et occupent Newcastle. Charles Ier, la mort dans l'âme, doit convoquer un nouveau Parlement pour le 3 novembre 1640. Malheureusement pour lui,
cette fois, il n'a plus aucun moyen de s'opposer efficacement aux députés. Les caisses du trésor sont vides, il n'y a pas d'armée royale en état de combattre, le gouvernement est violemment
impopulaire, l'église de Laud a de plus en plus d'adversaires dans la bourgeoisie et même dans la noblesse. Le Parlement a la haute main, et il s'en rend parfaitement compte.
Dès le début de la session, l'assemblée, dominée par l'énergique personnalité de John Pym (« le roi Pym », comme on dira bientôt) vote une série de mesures Révolutionnaires. On dirait les États
généraux de 1789 : interdiction pour le roi de rester plus de trois ans sans convoquer un Parlement ; annulation de tous les emprunts et taxes illégaux décrétés par le roi depuis 1631 ;
interdiction de dissoudre le Parlement sans l'autorisation des députés. « C'est la loi du Parlement perpétuel » ironise Charles. Mais le parlement refuse les crédits que le roi réclamait et exige
de son côté l'exécution du chancelier Strafford et de l'archevêque de Canterbury, Laud, en tant que traîtres. Le souverain, impuissant, signe toutes ces mesures. Pis que tout, il finit par
consentir à la condamnation de son conseiller et ami Strafford, qui est exécuté le 12 mai 1641.
En même temps, Londres s'agite : des Emeutes éclatent un peu partout, des cris de mort sont poussés contre la reine. Enhardi, le Parlement vote une « Grande Remontrance », véritable acte
d'accusation contre la royauté. Il exige en outre le contrôle du choix des ministres, qui représentent le pouvoir exécutif. La rupture entre le roi et son parlement devient inévitable.
Cependant les paysans passaient déjà à l'action et prenaient les terres des nobles pour les cultiver. Alors le roi demanda qu'on lui livre les meneurs et fit occuper le parlement par ses troupes
: en 1642, Charles Ier pénètre dans le parlement pour tenter d’arrêter cinq députés. Cela provoque un Soulèvement à Londres, ce qui oblige le roi à se réfugier à Oxford. Laud est arrêté et
emprisonné à la tour de Londres. Toute la vieille constitution monarchique du royaume est ébranlée.
Dès lors, la guerre civile est inévitable. Charles Ier rallie ses partisans à Nottingham, pendant que le Parlement lève une armée. La première guerre civile a lieu de 1642 à 1645. Le Long
Parlement contourne la volonté du roi et monte une armée dirigée par le comte d'Essex afin de contrer une invasion écossaise ainsi que les actions de reprise de pouvoir du roi par les Royalistes.
Au début, les armes favorisent plutôt le roi, qui s'installe à Oxford et tente d'y réunir un contre-Parlement. Le roi réussissait à reconquérir presque la moitié du territoire anglais, mais
surtout des régions arriérées, avec une population parsemée, tandis que les grandes villes étaient acquises pour la Révolution.
Le camp du parlement était au début dominé par les presbytériens (grands propriétaires fonciers, riches commerçants et banquiers). Leur manière de mener la guerre était indécise et bien que
l'armée du parlement était supérieure en nombre, elle subissait une défaite après l'autre. Désespérant de venir à bout des troupes royalistes, le Parlement élu en 1640, de plus en plus dominé par
les puritains, conclut une alliance avec les presbytériens d'Écosse. Après la dictature religieuse de Laud (finalement exécuté le 16 janvier 1645) s'établit celle des calvinistes. Le Parlement,
jusqu'alors populaire, commence à faire figure d'oppresseur, et les querelles de personnes le paralysent après la mort de Pym en décembre 1643.
Alors que les chefs de l'armée parlementaire suivent avec réticence l'évolution des événements, un obscur
député, Oliver Cromwell, sort de l'anonymat et prend un ascendant de plus en plus marqué. Député au parlement en 1628, Olivier Cromwell (fermier-gentilhomme, membre de la gentry jusqu'au début de
la première guerre civile) soutient ce dernier en organisant une troupe parmi ses voisins, dès le début de la guerre. Ce soldat réaliste sait estimer la supériorité de la partie adverse et
comprend vite que la victoire de son camp ne peut être obtenue qu'avec des soldats dévoués à la cause. En 1643, il lève une troupe de cavalerie organisée selon des principes Démocratiques
(officiers élus par la troupe, discussions idéologiques...) : les « Ironsides » (côtes de fer). Sa milice armée est divisée en deux camps : les Indépendants constitués par les officiers, et les
soldats. De cette troupe émergent des groupes politiques radicaux appelés les « levelers » (Niveleurs) et les « diggers » (Bêcheux). Pour eux, l’édifice politico-religieux qui soutient la
monarchie et l’aristocratie est une fable et une usurpation du pouvoir.
Les Niveleurs s'opposaient aux privilèges dont jouissaient les classes dirigeantes de l'ancien régime tout en défendant la propriété privée et en reconnaissant qu'une société devait accorder des
statuts particuliers aux personnes accomplissant les tâches nécessaires au gouvernement et au maintien de l'ordre. Leur but était essentiellement l'Egalisation des richesses.
Les Bêcheux, ou Piocheurs étaient une faction chrétienne, fondée en 1649 par Gerrard Winstanley. Se faisant appeler Vrais Niveleurs à leurs débuts (True Levellers), le public finit par les
baptiser « Bêcheux » en raison du mode de vie qu'ils prônaient. Leur nom s'explique par leur croyance au communisme chrétienne, tel que rapporté dans les Actes des Apôtres. Les Bêcheux tentèrent
de réformer l'ordre social existant par un style de vie strictement agraire (refusant l'enclosure
act : l'appropriation privée des prés communaux et plus généralement des terres communales, terres qui étaient auparavant mises en commun par les paysans et habitants), s'organisant autour de
petites communautés rurales Autonomes et Egalitaires. Le mouvement des Diggers s'est éteint vers 1652 en raison de la destruction de leurs colonies par les propriétaires terriens locaux.
Les Indépendants, soutenus par la majorité du Peuple de plus en plus mécontent, prennent la direction de l'armée. En 1645, le parlement charge Cromwell (nommé lieutenant-général) de réorganiser
l'armée sur le modèle de ses propres troupes. Une grande réforme militaire crée en 1645 l'armée dite du « Nouveau Modèle », où les Indépendants, qui rejettent autant la dictature puritaine que
l'anglicane, sont prépondérants. Les paysans et les artisans représentaient alors l'essentiel des troupes et des officiers simples, l'organisation fut centralisée et la solde payé régulièrement.
Le chef de l'armée était Lord Fairfax, Cromwell étant son adjoint. Ce sera « l'armée des saints », qui raflera la mise sous la conduite de Cromwell et à son profit.
Qui est donc ce nouveau venu ? Cromwell se consacra à l'exploitation de ses terres et à sa charge de juge de Paix, qui lui fit prendre contact avec les réalités sociales. A 28 ans, il fut élu
député après avoir surmonté une crise religieuse dont sa foi sortit fortifiée. En 1645, il a quarante-six ans. Issu d'une famille honorable mais pauvre de la région de Cambridge, il est
profondément croyant, assez tolérant (même si il montra surtout sa détermination à défendre le protestantisme le plus pur), mais refuse absolument l'autorité des évêques anglais aussi bien que
celle des pasteurs puritains et presbytériens. Sa relation avec dieu est ardente mais directe, et ne souffre pas d'intermédiaires. Il méprise les députés, bavards impuissants, et se trouve à
l'aise dans l'armée, où il compte de plus en plus de partisans. Le 16 juin 1645, il écrase l'armée royale à Naseby près de Coventry : l'armée paysanne anéantit l'armée royale et faisait 5000
prisonniers, sans parler de l'artillerie complète.
Charles Ier se réfugie auprès des Écossais, qui le livrent au Parlement (moyennant un forfait de 400 000 livres). Le 2 juin 1647, un coup de force militaire s'empare du roi, que Cromwell tient
désormais en son pouvoir. À partir de ce moment, les événements se précipitent.
Les bourgeois anglais avaient obtenus ce qu'ils voulaient et pensaient renvoyer les soldats, les paysans et les artisans. Mais ceux-là ne se laissent pas faire. Un nouveau parti s'est constitué à
ce moment : les Niveleurs, dont le représentant le plus important était John Lilburne. Libéré en 1640 sur ordre du Long Parlement, il a rallié la New Model Army où il obtint le grade de
lieutenant-colonel en 1645. Devant le refus affiché par les hommes de Cromwell de payer et d’accorder aux Niveleurs des Droits politiques Egaux, plusieurs soldats manifestèrent leur
mécontentement. Lilburne prit alors la tête des Niveleurs et rédigea avec eux de nombreux pamphlets en très peu de temps. Il fut à nouveau emprisonné en 1649 avec ses amis.
Les Niveleurs (Egalisateurs, comme ils furent appelés par leurs ennemis) revendiquaient les mêmes Droits pour tous et que les terres des nobles passent aux mains des paysans. Les Niveleurs
étaient très nombreux dans l'armée et parmi les artisans dans les grandes villes. Lorsque le parlement voulu dissoudre l'armée, ils procédèrent à des élections de conseils de soldats, appelés
agitateurs. Ainsi l'armée était divisée en deux : la majorité des officiers était du côté des « Indépendants » tandis que les soldats étaient des Niveleurs. Alors Cromwell institua un conseil
général de l'armée, constitué de deux représentants des Niveleurs et deux des Indépendants de chaque régiment. Ce conseil général de l'armée se réunit à Putney, près de Londres, pour discuter les
objectifs de la Révolution, mais sans résultat. Les débats de Putney, du 28 octobre au 11 novembre 1647, sont une série de discussions ayant eu lieu entre les membres de la New Model Army et les
Niveleurs au sujet d'une nouvelle constitution pour l'Angleterre.
Suite aux débats de Putney, Oliver Cromwell impose The Heads of the Proposals au lieu du Agreement of the People des Niveleurs. L'Agreement of the People était un contrat social pour le
gouvernement anglais Révolutionnaire. Le document clamait le droit au suffrage universel masculin et un gouvernement plus Egalitaire et offrant une meilleure représentation à la Chambre des
communes. Lilburne expose quelques principes jugés comme Révolutionnaires :
* Droit pour chacun d'élire ses représentants (tous les deux ans),
* Liberté de culte et d'expression,
* Egalité de chacun devant la loi,
* Protection de la vie et de la propriété de chacun,
* Abolition de la peine de mort, sauf pour les crimes de sang,
* Proportionnalité des peines,
* Suppression de l'incarcération pour dettes impayées,
* Interdiction de la conscription militaire et protection des objecteurs de conscience,
* Fin des monopoles légaux (en particulier celui de l'imprimerie, qui facilite la censure) et des taxes sur les denrées,
* Impôts proportionnels.
On notera ici la défense du suffrage universel, d'autant plus exemplaire dans ce contexte de guerre
religieuse que les puritains, auxquels appartenaient les Levellers, rejetaient cette idée. En effet, la plupart des sectes puritaines désapprouvaient ce type de réforme, car elle risquait de
mettre les « saints » hommes sous la coupe réglée de la « canaille ». A ce sujet, soit la proposition de Lilburne s'explique par une sorte de scepticisme religieux soit elle participe d'une
solution théologique originale : à l'encontre du pessimisme augustinien, Lilburne professait une théologie inspirée de l'antinomianisme. Pour Lilburne, le Christ était mort pour sauver, non une
poignée d'élus, mais bien toute l'humanité. De là, le chef des Niveleurs tire la conclusion que l'humain d'après la Chute n'est pas voué à subir le pouvoir politique. Et de justifier ainsi sa
position : « De même que dieu a créé chaque humain Libre en Adam, de même tous sont également nés Libres, et ils sont Libérés dans la grâce par le Christ, aucune faute des parents ne suffisant à
priver l'enfant de cette Liberté. Et bien que cette coutume mauvaise et non chrétienne de la servitude ait été introduite par le conquérant normand, elle n'était qu'une usurpation violente de la
loi sous laquelle nous avons été créés, de la nature et elle est maintenant, depuis que la lumière de l'Evangile a brillé, totalement abolie comme étant une chose odieuse au regard de dieu comme
au regard de l'humain ».
Les Niveleurs espérait que la nouvelle constitution soit basée sur l'Agreement, mais sa version définitive
s'est révélée être beaucoup moins Révolutionnaire. Par conséquent il y avait des Révoltes dans l'armée. Cromwell décide alors de renvoyer le conseil général de l'armée et de réprimer les
Niveleurs. Le 17 novembre 1647, la Mutinerie de la New Model Army éclate à Corkbush Field : les soldats avaient reçu l'ordre de signer une déclaration de loyauté envers Thomas Fairfax, le
commandant-en-chef de l'armée, ainsi qu'envers le Army Council. Ils refusent et l'un des chefs Mutins, Richard Arnold, est exécuté.
La deuxième guerre civile a lieu de 1648 à 1649. Au printemps 1648, la noblesse avait réussi à former une
nouvelle armée parmi les presbytériens en écosse pour écraser la Révolution. Sous la menace, les deux factions de l'armée s'unissent contre l'ennemi commun. La New Model Army met en déroute des
insurrections royalistes dans le Surrey et le Kent. À la bataille de Preston, elle met fin à une invasion écossaise. C'est une bataille clé de la première Révolution anglaise, remportant la
victoire sur les royalistes et les Écossais.
Cromwell offre alors à Charles Ier de négocier (offre sincère ou simple leurre, allez savoir), mais Charles finasse, joue double jeu, tente de s'évader, est repris, et Cromwell décide d'en finir.
Le Parlement est peu enclin à juger son souverain légal : plus de deux ans s'écoulèrent avant son exécution. Ce délai s'explique par les courants contradictoires qui agitaient le Parlement. En
effet, les presbytériens, partisans d'une église fortement structurée, soutenus par les Ecossais, s'opposaient aux Indépendants, partisans de la Liberté au sein du protestantisme ; ce conflit
religieux se doublait d'un conflit politique qui opposait royalistes et républicains. Les vainqueurs s'étaient divisés, et des tractations avaient lieu entre le Parlement, effrayé des options
politiques de l'armée, qui n'avait pas été payée et qui refusait de se séparer, et le roi. Cromwell, convaincu de la duplicité du roi, qui complotait avec les Ecossais repentis, écrasa ces
derniers.
Pour plus de sécurité, le Parlement est épuré (très réduit Parlement croupion), quatre-vingt-seize députés jugés trop tièdes sont chassés manu militari (tout membre de la Chambre des communes qui
n'est pas du côté de la religion, puritaine, des Independents ou du côté des Grandees, les officiers supérieurs de la New Model Army, est retiré de force du Parlement), et une commission
soigneusement choisie est constituée afin de juger le roi pour trahison. Jamais n'avait été affirmé de façon aussi éclatante le principe de la supériorité du pouvoir populaire sur le pouvoir
royal. Cromwell en est parfaitement conscient (« cruelle nécessité ») car il n'éprouve pas de haine personnelle contre Charles Ier : c'est bien le roi qu'il faut éliminer, en tant que roi.
Quelques jours après l'exécution, une loi votée par ce qui reste du Parlement décrète la fin de la monarchie, « danger pour la Liberté et la sécurité du Peuple », et instaure la
république.
Cette république, inaugurée le 19 mai 1650, ne durera pas longtemps. Cromwell, qui dispose du pouvoir
effectif grâce à l'armée, se trouve bientôt aux prises avec les extrémistes politiques et religieux, ceux qu'aujourd'hui on appellerait volontiers des Anarchistes, tels les « Niveleurs » qui
veulent établir une Egalité absolue entre les humains au nom de l'Évangile et refusent toute autorité.
Des travailleurs et des paysans sans fermes, à Whalton-on-Thames, dans le Surrey, occupèrent la terre communale en 1649 et commencèrent à la sarcler et à l’ensemencer. On les appela les Diggers,
les « Bêcheurs ». Ils voulaient vivre ensemble, mettre en commun les fruits de la terre. Plusieurs fois, les propriétaires terriens excitèrent contre eux des foules déchaînées. Villageois et
soldats les attaquèrent et détruisirent la récolte. Quand ils coupaient du bois dans la forêt domaniale, les seigneurs les dénonçaient. Ils disaient qu’ils avaient violé leur propriété. Les
Bêcheurs se sont alors transportés à Cobham Manor, où ils ont construit des maisons et semé du blé. La cavalerie les agressa, détruisit les maisons, piétina le blé. D’autres comme eux s’étaient
réunis dans le Kent et dans le Northamptonshire. Une foule en tumulte les éloigna. Les idées Utopiques, où le sectarisme le disputa à l'inspiration, et la générosité sociale des « Partageux » se
heurtèrent à la défense de la propriété : la loi les chassa, mais sans hésiter ils reprirent leur chemin.
Cromwell est, fondamentalement, un homme d'ordre. Ce qu'il a en vue est le règne de dieu, dont il est
l'interprète et l'instrument privilégié. Pour Cromwell il restait encore deux problèmes à résoudre : briser l'influence des Niveleurs, qui rêvaient d'une Démocratie sociale et Egalitaire, et
mater les Irlandais ainsi que les Ecossais. Ce qu'il fit en un seul coup. En menant son armée en Irlande, où il faisait une guerre cruelle contre les Irlandais catholiques, les Niveleurs en
Angleterre étaient affaiblis. En même temps il divisait les Ecossais en donnant des terres pris des Irlandais aux riches bourgeois écossais. Car au cours de cette guerre en Irlande qui a durée 4
années, il faisait brûler chaque village et chaque ville. Ensuite il allait avec ses troupes en Ecosse. En effet, Charles II, le fils de Charles I, était devenu roi des Ecossais. Au bout de
quelques batailles Charles II fut forcé de s'exiler en France en 1654.
Dès 1652, il n'a plus de rival. Il rétablit l'ordre en Angleterre, qu'il gouverne d'une poigne de fer. Mais Cromwell s'accommodait mal des prétentions légalistes des bourgeois du Rump. S'appuyant
sur l'armée, il dispersa le Parlement croupion (rump) : le 20 avril 1653, le Parlement est dissous par la force (on croirait, toutes proportions gardées, vivre par anticipation le 18 brumaire de
Napoléon Bonaparte). Alors que Bonaparte se fera proclamer premier consul, Cromwell, installé à la résidence royale de Hampton Court, prit le titre de « lord-protecteur de la république
d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande » (en fait, maître absolu). Les Parlements convoqués n'eurent qu'une brève existence.
Cette dictature militaire se doublait d'une dictature puritaine : stricte observance des dimanches, interdiction des spectacles, des courses, des combats de coqs. Ses ennemis le qualifient de «
tyran hypocrite », moquant sa manie de parler au nom de dieu ; mais tout semble lui réussir, à l'intérieur comme à l'extérieur. Dans le domaine extérieur, l'Acte de navigation (1651) prépara la
prépondérance maritime anglaise. Il engage la guerre contre la Hollande, qu'il gagne. Il s'allie à la France de Mazarin contre l'Espagne.
Le Conseil des officiers élabore alors l' « instrument de gouvernement », sorte de constitution qui institua une dictature militaire.
Songe-t-il, alors, à devenir roi ? Tout porte à le croire. Il est qualifié d'altesse, s'entoure d'un faste royal. Pourtant, en mai 1657, quand un nouveau Parlement lui offre la couronne, il la
refuse. Hypocrisie ? Scrupule sincère ? Simple manœuvre ? Plutôt crainte de la réaction des régiments, son seul soutien.
Toujours est-il que, s'il n'a pas le titre de roi, il en a tous les pouvoirs. Toute l'Europe s'attend à ce qu'il franchisse le dernier pas. Mais il meurt, inopinément, âgé de cinquante-neuf ans,
le 3 septembre 1658. Pour ses funérailles, il portera la couronne royale. Son fils Richard lui succédera, avant d'abdiquer, quelques mois plus tard, et de laisser la place au fils de Charles Ier,
Charles II, réfugié aux Pays-Bas. En effet, après la mort de Cromwell, le général George Monk (gouverneur de l'Ecosse), craint que la nation ne sombre dans le désordre et cherche à rétablir la
monarchie. De fait, les bourgeois du parlement décident de rappeler Charles II pour en faire leur roi. Méprisant la beauté et la pompe, les puritains de Cromwell avaient imposé une tyrannie
spirituelle telle que le retour sur le trône de Charles II en 1660 fut accueilli comme une libération après toutes ces années de vie triste et sombre.
Cependant, quand celui-ci revient, il est loin de jouir du même pouvoir que son père. Le véritable pouvoir réside désormais au Parlement. Charles II, comme punition à un exemple à ne pas suivre,
exhuma de sa tombe le cadavre de Cromwell pour lui faire subir le rituel d'exécution post-mortem le 30 janvier, date anniversaire de l'exécution de Charles Ier. Son corps est jeté dans un puits
et sa tête exposée sur un pieu devant l'abbaye de Westminster pendant 20 ans.
Peut alors se poser la question : tant de sang, tant de deuils, tant de ruines pour aboutir au retour du roi
Stuart, la Révolution aurait-elle eu lieu en vain ? Pas tout à fait. Charles II ne régnera pas comme Charles Ier : question de caractère, certes, mais aussi de contexte. Plus personne, en
Angleterre, même le roi, ne parlera désormais de monarchie absolue. La Liberté religieuse est acquise une fois pour toutes (sauf pour les catholiques, et ce pour longtemps). Les Droits du
Parlement ne seront plus jamais remis en question. Tel est le legs de la Révolution de 1640, qui sera consolidé à la fin du siècle par la deuxième Révolution, celle de 1688 : en 1685 le frère de
Charles, Jacques II, monte sur le trône et croit pouvoir rétablir une monarchie absolue. Au bout de trois ans la bourgeoisie perdit patience et invita Guillaume III d'Orange à devenir leur roi.
Celui-ci débarque en Angleterre sans trouver de résistance et se met sur le trône. Mais pour être sûr qu'il n'y aurait plus de malentendu, le parlement lui impose une constitution bien serré. Et
dans l'avenir, l'héritage de la monarchie devait passer à la maison d'Hanovre, petit prince insignifiant d'Allemagne.
En France, de 1651 à 1652, le parlement et les princes manipulent le Peuple pour appuyer leur lutte contre
l´absolutisme royal incarné par Mazarin, le régent de la couronne : c’est la Fronde parlementaire. L´entrée en lice du Peuple, comme en 1789 utilisé pour renverser le pouvoir puis réprimé pour
stabiliser la nouvelle forme étatique toujours défavorable à ses aspirations, inquiète la noblesse et la bourgeoisie qui manœuvrent pour protéger leurs privilèges contre la centralisation absolue
et l’état de fonctionnaires plutôt que de copinage.
En Russie aussi les choses allaient bouger. De 1668 à 1671, une Révolte des cosaques du Don, dirigée par
Stenka Razine, dans la région de la Volga, fit vaciller le régime.
Une guerre contre la Pologne (1654-1667) et contre la Suède (1656-1658) demanda de lourds sacrifices au Peuple russe. Les taxes augmentèrent et la conscription se fit plus forte. Énormément de
paysans espéraient échapper à cela en rejoignant les Cosaques dirigés par Stepan Razine qui furent aussi rejoints par beaucoup de représentants de groupes exclus par le gouvernement russe, tels
les classes les plus basses de la société et les ethnies non russes oppressées.
Le premier exploit considérable de Razine fut de détruire la grande caravane d'eau constituée de nombreux bateaux de fret transportant de grandes richesses appartenant notamment à de riches
marchands moscovites ou au patriarche. Razine descendit la Volga avec une flotte de quarante cinq galères, capturant les forts importants de cette voie et dévastant le pays. Au début de l'année
1668 il vainquit le voïvode Yakov Bezobrazov, envoyé contre lui depuis Astrakhan, et durant le printemps il embarqua pour une expédition punitive en Perse qui dura dix huit mois.
Le Peuple était alors fasciné par ses aventures. Les régions russes les moins sujettes à la loi, près d'Astrakhan, où l'atmosphère était dangereuse et où beaucoup de gens étaient encore nomades,
étaient propices à une Rébellion comme celle de Razine.
En septembre 1669, effrayés par la puissance de Razine, les voïvodes d'Astrakhan lui ouvrirent les portes de la ville en échange d'une part de son butin.
En 1670, Razine, pendant son retour vers le quartier général cosaque situé sur le Don, commença une Rébellion
ouverte contre le gouvernement, capturant Cherkassk, Tsaritsyne et d'autres lieux. Il pénétra le 24 juin dans Astrakhan même, avec une armée de 7000 hommes surtout composée de cosaques pauvres et
de paysans fugitifs. Après avoir massacré tous ceux qui s'opposaient à lui, dont deux princes prozorovsky, et pillé les riches bazars de la ville, il fit d'Astrakhan une république cosaque,
divisant la population en milliers, centaines et dizaines, avec leurs propres officiers. Dirigés par des veches (assemblées russes) ou des assemblées générales, leur première mesure fut de
proclamer Stepan Razine leur gosudar, c'est-à-dire leur souverain.
Après trois semaines de carnages et de débauches, Razine quitta Astrakhan avec deux cents bateaux remplis de troupes pour établir la république cosaque le long de la Volga, afin d'avancer ensuite
jusqu'à Moscou. Saratov et Samara furent capturées, mais la ville de Simbirsk résista, et après deux batailles sanglantes près de la rivière Sviyaga
(1er puis 4 octobre), Razine fut mis en déroute et s'enfuit par la Volga, laissant la majorité de ses troupes et de ses fidèles aux mains des vainqueurs.
La défaite de Simbirsk s'explique surtout par le fait que les troupes de Razine, fortes de vingt mille combattants, formaient une armée indisciplinée et mal organisée, qui affronta des troupes
régulières entraînées selon les méthodes occidentales.
Mais la Rébellion se propagea par d'autres moyens. Les émissaires de Razine, partis de Tsaritsyne armés de proclamations enflammées, allèrent dans les gouvernements modernes de Nijni-Novgorod,
Tambov, Penza et même jusqu'à Moscou et Novgorod. Il ne fut pas difficile d'inciter la population oppressée à la Révolte par la promesse d'une délivrance. Razine proclama que son objectif était
de renverser les boyards et les officiers, d'installer l'absolue Egalité dans toute la Moscovie, en supprimant les hiérarchies. Razine proclamait son hostilité aux boyards et aux maîtres mais ne
faisait pas du tsar son ennemi (la rumeur voulait alors que Razine avait pour compagnons le tsarévitch Alexis et le patriarche Nikon disgracié). Le Peuple et les soldats firent bon accueil aux
idées de Razine, et les tribus indigènes souhaitèrent même renverser l'ordre établi. Les populations de la Volga, les Tchouvaches, les Maris, les Mordves, les Tatars se joignirent aux Insurgés.
Toute la région de la Volga et l'est de l'Ukraine s'étaient Soulevés, les paysans assiégeant les couvents et mettant à sac les domaines.
Au début de l'année 1671, l'issue de la Lutte était encore douteuse. Huit batailles menées durant
l'Insurrection entrainèrent des signes d'épuisement de la part des troupes de Razine, qui n'étaient pas composées de soldats réguliers et qui n'avaient pas l'entrainement nécessaire à une guerre,
et cela continua six mois. Cependant, à Simbirsk, le prestige de Razine avait été dissipé. Même ses propres campements à Saratov et Samara refusèrent de lui ouvrir leurs portes et les Cosaques du
Don, apprenant qu'il avait été excommunié par le patriarche de Moscou, se déclarèrent même hostiles. En 1671, lui et son frère Frol Razine furent capturés à Kaganlyk, sa dernière forteresse, et
acheminés par les autorités cosaques jusqu'à Moscou, où, après torture, le 6 juin 1671, Stepan fut traîné, pendu et équarri sur la Place Rouge.
Astrakhan, dernier foyer de la Révolte, se rendit à son tour quelques mois plus tard.
La Révolte de Razine fut spontanée, locale, sans programme politique bien arrêté. Même s'il combattait le
système féodal, il se proclamait pour un bon tsar. Cependant, son œuvre fut importante. De nombreuses chansons populaires racontent son histoire et en font un héros. Suite à cette Révolte, le
gouvernement étouffa l'Insurrection et durcit sa politique, menant des représailles massives.
La Révolte de Razine fut enseignée dans les livres d'histoire de l'URSS. Elle constituait, selon les historiens de l'URSS un acte préRévolutionnaire, en quelque sorte une prémisse de la
Révolution de 1905 car Razine est décrit comme un Libérateur du Peuple se Rebellant contre les autorités tyranniques tsaristes, et obtenant le soutien du Peuple russe.
Selon certains livres, l'œuvre de Razine fut un vigoureux acte de Lutte du Peuple pour sa Libération, une importante étape de la formation de ses traditions Révolutionnaires :
* Trotsky se réfère dans ses écrits souvent à Stepan Razine, présenté comme meneur de Soulèvement paysan. D'après lui, ces derniers ont permis à Razine et Pougatchev d'émerger, puis servirent de
fondations à la Lutte d'autres classes de la population. Le cas de Razine montre selon lui qu'une Révolution ne peut être que paysanne : « dans l'Histoire, la paysannerie ne s'est jamais élevée
de manière indépendante à des buts politiques généraux. Les mouvements paysans ont donné un Stenka Razine ou un Pougatchev et, toujours réprimés, servirent de fondation à la Lutte d'autres
classes. Il n'y a jamais eu nulle part de Révolution que purement paysanne » ;
* Bakounine, lui, voyait dans la Révolte de Razine l'œuvre d'une minorité de déclassés et de hors-la-loi et de bandits, qui, selon lui, devaient être les moteurs de la Révolution russe
suivante.
Razine préfigure la Révolte de Iemelian Pougatchev, également menées par les cosaques du Don, un vaste
mouvement antiféodal dans toute la petite Russie qui ébranla de 1773 à 1775 le pouvoir de Catherine II.
Cette Révolte a lieu dans une région frontalière et tampon, le Iaïk, à l’est de la Volga. Elle a pu rassembler jusqu’à 4 millions d’habitants. Les Rebelles sont des cosaques, des fugitifs
militaires, paysans ou politiques, des peuples locaux : Bachkires, Tartares, Kalmouks (populations nomades, généralement musulmanes qui en général ont subi une sévère répression dans les années
1735 – 1765), des victimes du servage (serfs paysans ou serfs d’usine).
La grande Révolte de 1773-1775 s’inscrit dans un contexte de tension grandissante au sein des communautés cosaques, à mesure que s’étendait inexorablement sur eux le pouvoir « régulateur » de
l’état russe. Elle fut déclenchée après cinq années de guerre, de peste, de hausse des prix, de services et de levées de plus en plus écrasantes. Beaucoup des sujets de mécontentements cosaques
avaient été exprimés par les cahiers et les doléances de leurs députés à la commission législative, confirmés par l’agitation continuelle qui suivit, entre la fin des années 60 et celle des
années 70. Il y eut alors une répression sévère (amende collective, travaux forcés, knout…) de toutes les Mutineries, séditions et oppositions en tous genre au gouvernement russe. Dans une telle
situation, le bruit qu’un autre tsar vivait qui ferait droit aux revendications des mécontentements, ne pouvait qu’éveiller des échos.
Fils d'un cosaque du Don, petit propriétaire terrien, marié à une cosaque Sofia Nedioujeva en 1758, il
participa, la même année, à la guerre de sept ans sous le commandement du comte Zakhar Tchernychev. Dans la première guerre russo-turque, 1768-74, Pougatchev, maintenant un cosaque khorunjiy
(correspondant au rang dans l'armée de podporoutchik, ou sous-lieutenant), servit sous le comte Pierre Panine et participa au siège de Bender.
Rendu à la vie civile, il passa plusieurs années à errer et plus d'une fois les autorités le firent jeter en prison pour vagabondage.
En 1761 Pierre III dans son « Acte sur la liberté de la noblesse » libère celle-ci de tout service
obligatoire envers l'état à l'exception du service militaire en temps de guerre. Le bruit court que le nouveau tsar se prépare à abolir le servage. C'est à ce moment-là que Catherine, profitant
du mécontentement nobiliaire, s'empare du pouvoir. Le couple se déteste et comme de bien entendu ne donne le jour à aucun héritier pendant huit ans, au grand mécontentement de la tsarine
Élisabeth qui pousse Catherine à prendre un amant. Le 9 juillet 1762, trois régiments de la garde du tsar Pierre III se détournent de leur maître et prêtent serment de fidélité à son épouse,
Catherine, « pour la défense de la foi orthodoxe et pour la gloire de la Russie ». Leur révolte est animée par le propre amant de la reine, Grégoire Orlov. Le tsar, honni de la noblesse pour ses
sentiments germanophiles (sa femme étant prussienne), abdique dès le lendemain. Il meurt une semaine plus tard dans sa retraite, sans doute tué par l'un des frères Orlov dans une querelle
d'ivrognes. Son corps, ramené à Saint-Pétersbourg, est exposé aux yeux du Peuple. Ainsi débute le règne immense de Catherine II la Grande. Mais la prise de pouvoir de Catherine II suscite des
mécontentements. Malgré cette preuve publique, des imposteurs, originaires de multiples provinces, tentent de se faire passer pour le tsar défunt. Le plus célèbre d’entre eux est
Pougatchev.
En 1767 Catherine publie son programme dans une « Instruction ». Ce texte, inspiré par l'Esprit des lois est
à tel point libéral pour l'époque que sa publication sera interdite en France. Elle convoque une Commission législative (comparable aux États généraux de 1789) dans laquelle toutes les couches de
la population seront représentées, excepté le clergé et les paysans serfs.
La Commission ne participa pas directement à l'élaboration de nouveaux codes, mais elle examinera 1 441 cahiers de doléances dont 1 066 contenaient des revendications paysannes. Ses travaux
dressent un tableau général de la situation économique et sociale du pays. Pour la première fois il y eut un débat très vif sur le servage, démontrant la nécessité d'une réforme radicale.
Les travaux de la Commission atteindront de larges couches de la société russe grâce au développement de l'imprimerie et de la presse. Cela entraîne deux conséquences : le mécontentement de la
noblesse terrienne qui voit le sort pénible des paysans étalé au vu et au su de tous ce qui entraîne un raidissement encore plus grand vis-à-vis des paysans ; d'autre part, le discours très
libéral de l'impératrice suscite des espérances qui, déçues, conduiront en 1773-1774 à la Révolte conduite par Pougatchev et qui sera l'une des plus dramatiques de l'histoire de
l'empire.
Repris le 1er juillet 1770 à Kazan après avoir déserté, Pougatchev s’évade et réapparaît dans la steppe où il
affirme être le tsar Pierre III. En 1773, après avoir fréquenté les monastères des vieux croyants qui exercèrent une influence considérable sur lui, il se proclama soudainement le tsar Pierre III
et organisa l'Insurrection des cosaques Yaik qui déclencha une Jacquerie de toute la petite-Russie (basse Volga). Promettant l’abolition du servage aux paysans, il s’entoure de Rebelles et prend
d’assaut de nombreuses fortifications.
Le système du servage, souvent plus proches de l'esclavage personnel que de l'asservissement à la terre, propre à la Russie s'est constitué au cours du XVIIIè siècle, sous les règnes des tsars
réformateurs de la dynastie des Romanov, Pierre Ier le Grand et Catherine II, à contre-courant donc du reste de l'Europe (qui l’abolira en 1815 au plus tard, alors qu’il subsiste en Russie
jusqu'en 1861). Une telle pratique répond alors à deux sortes de considérations : il s'agit au départ d'une réaction défensive contre la fuite d'une main-d'œuvre indispensable pour assurer la
simple consommation de la noblesse, mais c'est aussi un moyen pour les tsars de s'attacher les services et la fidélité des nobles auxquels la propriété des terres a été octroyée. Structurée, et
en partie créée par Pierre le Grand, la noblesse lutte pour son émancipation pendant plusieurs dizaines d'années. Sous le règne d'Anne (1730-1740), puis d'Élisabeth (1741-1761) un nouveau système
se substitue à celui de Pierre le Grand, qui était basé sur le service d'état. La noblesse acquiert de nouveaux droits sur la personne des serfs, dont le nombre ne cesse de s'accroître du fait de
la distribution des domaines aux grands dignitaires.
Le pouvoir ne prit pas le mouvement au sérieux et se contenta de mettre la tête de Pougatchev à prix.
Il progresse jusqu’à la Volga à l’Ouest, et met de son côté les minorités ethniques. Les Bachkirs musulmans menés par Salavat Ioulaiev se Soulèvent à leur tour et se joignent au mouvement. Les
Cosaques de l’Oural, les serfs et les ouvriers de plusieurs provinces, ainsi que les Tartares, se rallient à son mouvement et c’est à la tête de trente mille hommes qu’il assiège et prend
Tcheliabinsk, en février 1774. Dans sa marche vers Saint-Pétersbourg et vers Moscou, il est arrêté à Orenbourg : en mars 1774, la ville, forteresse de l'Oural, est assiégée. La ville d’Orenbourg
a été fondée en avril 1743, avec la tâche précise de devenir un quartier général pour les ambitions géopolitiques et la défense de l’empire russe aux portes de l’Asie : Orenbourg était jadis un
poste de douane important qui percevait les droits de passage des navires et des caravanes. Les Ouzbeks, les Kirghizes, les Tadjiks, tous ces nomades venaient de Tachkent ou de Samarkand en
longues caravanes de chameaux, pour troquer leurs pelleteries contre de la nourriture, des munitions de chasse, des instruments de travail.
À Nijni, les serfs brûlent les manoirs et égorgent leurs maîtres. Le gouvernement, prenant enfin la mesure du péril, se décide à réagir. L'armée du général Bibikov libère Orenbourg. En août 1774,
le général Mikhelson inflige une défaite décisive près de Tsaritsyn (Volgograd).
Surtout les Cosaques, lassés par les excès du nouveau « tsar », ne supportent pas de voir leurs intérêts confondus avec ceux des serfs Révoltés ; ils décident d'en finir avec Pougatchev. Il se
réfugie dans la steppe. Livré par ses cosaques, il est présenté dans une cage en fer pour montrer au Peuple sa déchéance. Il est exécuté, puis sa dépouille est suppliciée
(écartelée).
En 1833, le tsar accorda une subvention de 20 000 roubles à Pouchkine pour lui permettre de travailler à une
histoire célèbre de la Révolte de Pougatchev. Alexandre Pouchkine fera de la Révolte de Pougatchev le cadre de son roman historique publié en 1836 La fille du capitaine. Le personnage du cosaque
apparaît lui-même dans l'intrigue et sous un jour plus mystérieux qu'antipathique.
En France, sous le règne absolu de Louis XIV, une Jacquerie se produit en Bretagne, contre l´instauration de
nouvelles taxes. Elle est dirigée contre les agents du roi, chargés de collecter les impôts, et les seigneurs, par les Bonnets Rouges et les Bonnets Bleus.
La Révolte des Bonnets Rouges affecta durement la Bretagne (troubles à Guingamp, Lamballe, Dinan et dans la région de Callac et de Maël-Carthaix), sans connaître l'ampleur des évènements du
Finistère et de l’Ille et Vilaine. C’est les débuts de l’époque des corsaires Bretons.
La Révolte du papier timbré est une Révolte antifiscale française, sous le règne de Louis XIV (d’avril à
septembre 1675), et qui prit également un tour antiseigneurial en Basse-Bretagne, sous le nom de Révolte des Bonnets rouges. Elle est déclenchée par une hausse des taxes, dont celle sur le papier
timbré, nécessaire pour les actes authentiques.
Elle est appelée Révolte des Bonnets rouges pour sa partie bretonne, car certains Insurgés portaient des bonnets bleus ou rouges selon la région, et également « Révolte des torreben » («
casse-lui la tête »), un cri de guerre qui sert également de signature dans un des codes paysans.
Louis XIV déclare la guerre aux Provinces-Unies en 1672. Mais, contrairement à la guerre de Dévolution, après
une progression rapide, l’armée française est stoppée par les inondations volontaires des Hollandais, et la guerre s’éternise.
La flotte hollandaise menace les côtes françaises, et notamment la Bretagne, en croisant sur ses côtes en avril-mai (après une descente sur Belle-Île en 1673 et une autre sur Groix en 1674), ce
qui gêne le commerce breton.
Pour financer la guerre, de nouveaux impôts sont levés :
* d’abord une taxe sur le papier timbré, en avril 1674, papier rendu obligatoire pour tous les actes susceptibles d’être utilisés en justice (dont les testaments, contrats de vente et
accessoirement, les registres d’état-civil), ce qui augmente le prix des actes pour les particuliers, tout en risquant de diminuer le nombre d’affaires pour les professionnels, d’où un
mécontentement général ;
* le 27 septembre 1674, la vente de tabac est réservée au roi, qui prélève une taxe et en afferme la vente. Les personnes autorisées à revendre le tabac (fermiers et commis) rachètent les stocks
aux commerçants qui en vendaient auparavant. La réorganisation des circuits de vente entraîne une interruption temporaire de la distribution de tabac à fumer et chiquer, d’où une autre source de
mécontentement ;
* à la même période, une nouvelle taxe frappe tous les objets en étain (même achetés longtemps avant), ce qui mécontente les paysans aisés, ainsi que les cabaretiers qui répercutent la taxe, d'où
une forte hausse sur les prix des consommations ;
* enfin, une autre taxe, touchant moins de monde, oblige les roturiers possédant un fief noble à verser une taxe tous les vingt ans.
Ces nouveaux impôts et ces menaces s’ajoutent à une situation économique difficile en Bretagne.
La Bretagne est alors très peuplée (environ 10 % de la population du royaume), et épargnée par les disettes et les épidémies depuis les années 1640. Dans les années 1660-1670, elle entre dans une
phase de difficultés économiques, largement liées aux premiers effets de la politique de guerre économique de Louis XIV, de l'augmentation sensible et simultanée des impôts, et de faiblesses
structurelles : par exemple, diminution des deux tiers du commerce du vin et des toiles d’après le duc de Chaulnes (surnommé « an hoc'h lart » : le gros cochon, en breton), gouverneur de
Bretagne, les revenus issus de la terre (fermages) diminuent eux aussi d’un tiers, entraînant une déflation généralisée, exceptée des offices.
La Révolte est très souvent menée par des femmes. À cette époque, la législation royale est de plus en plus draconienne à l'encontre des femmes (alors que Louis XIV les appréciait énormément,
sexuellement en tout cas), tous leurs Droits sont diminués, aussi bien leurs Droits économiques que civils (elles ne peuvent plus choisir leur époux par exemple). Ceci heurte dans un pays où la
femme occupe traditionnellement une place très importante, et on en trouve mention dans les codes paysans.
Enfin la Bretagne est un Pays d'états, où l’impôt sur le sel, la gabelle n'existe pas, et où les nouveaux impôts doivent être acceptés par les états depuis l’acte d'Union de la Bretagne à la
France. En 1673, les états avaient, outre un don gratuit de 2,6 millions de livres, acheté la suppression de la Chambre des domaines (qui privaient certains nobles de droit de justice) pour la
même somme et racheté les édits royaux instituant les nouveaux impôts, plus diverses autres dépenses en faveur du pouvoir royal pour un total énorme de 6,3 millions de livres. Un an après, les
mêmes édits sont rétablis, sans consultation des états. Et c'est par le Parlement de Bretagne que Louis XIV fait enregistrer la taxe sur le papier timbré en août 1673, et la taxe sur le tabac en
novembre 1674, au mépris des « Libertés bretonnes » (c'est-à-dire les privilèges d’Ancien Régime de la province, accordés par le traité d'union du duché de Bretagne au royaume de
France).
Les nouvelles taxes touchent plus les paysans et le petit Peuple des villes que les privilégiés, et font
craindre une introduction de la gabelle. Tout cela crée un large front de mécontentement contre la brutalité inédite de l'état royal.
Le Soulèvement débute à Bordeaux : du 26 au 30 mars, la ville est aux mains des Emeutiers. Les garnisons insuffisantes empêchent César d’Albret, gouverneur de la ville, de rétablir l’ordre, les
bourgeois refusant la levée des milices. À partir du 29, les paysans des environs arrivent à Bordeaux pour prêter main-forte aux Emeutiers. Le parlement de Bordeaux rend un arrêt de suspension
des nouvelles taxes sous la pression populaire. La nouvelle atteint rapidement Rennes et Nantes qui se Soulèvent début avril ; d’autres villes du sud-ouest se Soulèvent également pour les mêmes
raisons (Emeutes à Bergerac les 3 et 4 mai, etc.). Le 6 avril, le roi fait une déclaration d’amnistie pour les Emeutes de Bordeaux, son gouverneur n’ayant pas les moyens de reprendre la ville en
main.
En Bretagne, les Emeutes urbaines réellement spontanées se limitent aux deux grandes villes, Rennes et Nantes. Partout le schéma est le même : les bureaux de papier timbré ou de marquage de la
vaisselle en étain sont pillés, des affrontements ont lieu au cri de Vive le roi sans la gabelle ! Un premier Soulèvement a lieu à Rennes le 3 avril, mais le calme est vite ramené par le
procureur au Parlement. Une nouvelle Emeute a lieu le 18 avril (au moins dix morts), qui se propage le lendemain à Saint-Malo, puis le 23 à Nantes, et à nouveau le 3 mai à Rennes et Nantes.
D'autres villes sont touchées : Guingamp, Fougères, Dinan, Morlaix.
Les milices bourgeoises sont peu fiables, et passent quelquefois à l’Emeute. Le 8 juin, les troupes envoyées pour ramener le calme provoquent la colère de Nantes (sous l’Ancien Régime, toute
troupe est logée chez l’habitant, à sa charge : or, Nantes comptait parmi ses privilèges l’exemption du logement des gens de guerre), durant trois jours (9 au 11 juin) : le duc de Chaulnes est
assiégé dans son manoir, mais donne l’ordre de ne pas tirer, puis fait évacuer les troupes. Il subit des humiliations si importantes (insultes, absence de possibilité de réaction, l’évêque est
pris en otage et échangé contre une Emeutière prisonnière le 3 mai) qu’il cache, à partir de la fin juin, la réalité de l’agitation au roi dans ses rapports. Une dernière fois, le bureau du
papier timbré est mis à sac le 19 juillet à Rennes.
L’exemple des villes est suivi, à partir du 9 juin, par les campagnes de Basse-Bretagne : la Révolte connaît plusieurs foyers, de la baie de Douarnenez à Rosporden, Briec et Châteaulin. Les 3-4
juillet, la Révolte atteint les environs de Daoulas et Landerneau, le 6 elle est aux alentours de Carhaix, le 12 de Brasparts à Callac, et une dernière vague se manifeste les 27-28 aux alentours
du Faouët, à Lanvénégen par exemple, à l'occasion du pardon de Saint-Urlo. Les villes ne participent pas, mais sont attaquées. Le 21 juin, le duc de Chaulnes, gouverneur de Bretagne, est obligé
de s’abriter à Port-Louis.
Les paysans se Révoltent lorsque se répand le bruit que la gabelle va être introduite dans la province. La jacquerie éclate au milieu de la zone du domaine congéable, précisément là où ce régime
est le plus dur. Le duc de Chaulnes reconnaît que « les seigneurs les chargent beaucoup ». Les châteaux sont assiégés et pillés, ainsi que les bureaux du papier timbré ou des devoirs (taxe sur
les boissons), les nobles attaqués et tués.
Le maximum de violence est atteint fin juillet-début août dans le Poher, où Carhaix et Pontivy, villes non-fortifiées, sont attaquées et pillées. Les paysans sont commandés dans cette région par
un notaire, Sébastien Le Balp. Début septembre, il investit et pille, avec 600 Bonnets Rouges, le château du Tymeur et en brûle tous les papiers et archives. Il est tué par surprise d'un coup
d'épée par Charles Maurice de Percin, marquis de Montgaillard, son prisonnier, la nuit du 3 septembre, la veille du Soulèvement général prévu. Sa mort met fin à l'Insurrection.
Les paysans Révoltés établissent des codes et règlements, sous plusieurs noms (code paysan, pessovat – ce qui
est bon –...). On désigne par Code paysan l’ensemble des textes revendicatifs approuvés lors d’assemblées générales par les populations Soulevées. Ces textes peuvent être des programmes, des
plaintes, où ils expriment leurs revendications, mais également des codes que les Insurgés essayent de faire approuver ou appliquer.
L’origine de ces codes se concentre dans le sud Cornouaille. Ailleurs il y a eu des transactions locales entre Révoltés et seigneurs, devant notaire. On en connaît huit. Ils préfigurent, par leur
contenu, les cahiers de doléances de la Révolution française. Nombres de revendications sont communes à la plupart des codes, elles concernent le domaine fiscal, et dans le domaine politique, la
réaffirmation des Libertés bretonnes. Un des codes parle du pouvoir de la communauté villageoise, ce qui est une idée nouvelle. Le Règlement des 14 paroisses, probablement établi à l'église
Notre-Dame de Tréminou, est le plus connu. Il semble prendre la place de différents textes antérieurs. Rédigé en français, il engage les habitants de quatorze paroisses et doit être affiché aux
carrefours et lu lors des sermons du dimanche (comme les proclamations royales). Il ne remet pas en cause le régime politique, mais demande que les paysans soient représentés aux états
provinciaux (article 1) ; appelle au retour au calme et à la fin des violences (articles 2 et 3), mais la ville de Quimper et les paroisses environnantes sont menacées de blocus si elles ne
ratifient pas le code (article 13) ; au nom de la Liberté armorique, il proclame l’abolition des droits de champart et corvée prétendus par les gentilshommes (article 4), mesures des plus
audacieuses, le champart étant la principale ressource des seigneurs (cet article reflète aussi la dégradation récente de la situation paysanne devant l’augmentation des exigences seigneuriales,
allant au-delà du droit et des coutumes). Dans les articles suivants (6 à 9), les demandes sont surtout antifiscales (la mesure la plus importante est l'abolition de la dîme du clergé : le clergé
sera payé pour leur service, et seulement pour cela), une exigence de justice (revendication d'une justice gratuite, et qui soit exercée par des gens capables) et d’arrêt des abus est faite, mais
dans le cadre de la justice seigneuriale (article 10), donc sans remise en cause du système existant. L’article 5 demande même des mariages mixtes entre nobles et paysans, avec le droit pour les
femmes nobles de choisir leur mari (le droit des femmes à choisir leur mari avait été aboli sous le règne de Louis XIV). L'article 11 est également notable, avec une demande d'interdiction de la
chasse entre le 1er mars et la mi-septembre.
Toutes les villes fortifiées forment autant d’îlots de résistance (Concarneau, Pont-l'Abbé, Quimper,
Rosporden, Brest et Guingamp). Dans cette dernière ville, trois Emeutiers, dont une femme, sont pendus. La « punition » commence à Nantes, où les troupes séjournent 3 semaines. Les missionnaires,
notamment Julien Maunoir et les jésuites sont aussi utilisés, et font hésiter de nombreux paysans, ce qui permet d’attendre l’arrivée des troupes. Celles-ci arrivent fin août, et opèrent à partir
d’Hennebont et Quimperlé. La campagne dure tout le mois de septembre.
En Bretagne, le bilan de la répression est difficile à chiffrer, en effet le roi ordonne la destruction de toutes les archives judiciaires concernant la Rébellion et, de ce point de vue, cette
répression reste la moins connue de toutes les grandes Rébellions du XVIIIè siècle.
En France, dans l'Aquitaine et la Gascogne, l’arrivée des troupes et leur séjour de quelques semaines suffit
généralement à ramener le calme. À Bordeaux, le parlement revient sur son arrêt de suspension des taxes le 18 novembre : la ville est punie par l’obligation d’accueillir dix-huit régiments durant
l’hiver (les soldats et les officiers étaient logés chez l’habitant, à la charge complète de la ville), ce qui aurait coûté près d’un million de livres à la ville. De plus, le château Trompette
est agrandi et sa garnison augmentée, ce qui augmente le pouvoir symbolique et militaire du roi sur la ville, qui voit par ailleurs la porte Sainte-Croix (au sud de la ville) détruite. Autre
mesure symbolique : les cloches des églises Saint-Michel et Sainte-Eulalie sont confisquées.
La promesse d’amnistie est assez largement appliquée mais la répression a tout de même été féroce. Le pouvoir punit certes les élites mais se montra beaucoup plus sévère à l'égard des paysans
Révoltés. Le duc de Chaulnes écrivait : « Les arbres commencent à se pencher sur les grands chemins du poids qu'on leur donne », plusieurs personnes étant pendus en même temps.
Les principaux responsables sont envoyés devant une commission extraordinaire du parlement, les présidiaux pouvant juger exceptionnellement en dernier ressort, ce qui aboutit à de rapides
condamnations à mort. Dès octobre 1676, des condamnations aux galères et à la peine de mort sont prononcées envers les responsables.
Les communautés villageoises sont sommées de livrer les meneurs sous peine de représailles collectives, les cloches ayant sonné le tocsin sont déposées et plusieurs églises sont décapitées avec
interdiction de les remonter. Le 12 octobre, le duc de Chaulnes entre à Rennes, avec 6000 hommes, logés chez l’habitant : durant un mois, la ville subit les violences de la troupe, puis d’autres
prennent leurs quartiers d’hiver. Les habitants de la rue Haute sont expulsés, un tiers de la rue est démolie. Pour avoir soutenu les Emeutiers, le parlement est exilé à Vannes le 16 octobre
(exil qui dure jusqu’en 1690 et ne peut retourner à Rennes que contre un subside extraordinaire au roi de 500.000 livres), tout comme le parlement de Bordeaux, exilé à Condom le 22 novembre, puis
à Marmande et La Réole (lui aussi ne revient à Bordeaux qu’en 1690). Toute résistance politique à l’absolutisme est annihilée. Les états de Bretagne acceptent l’année suivante une augmentation du
don gratuit de 15 %, et toutes les demandes financières ultérieures du gouvernement, sans oublier les gratifications aux ministres, en particulier à Colbert et sa famille. La Bretagne doit
subvenir entièrement aux besoins des troupes de répression, puis d’une armée de 20 000 hommes (ce dernier point en représailles aux doléances des états de novembre 1675).
Le 5 février 1676 (enregistré le 2 mars par le Parlement), Louis XIV accorde son amnistie, avec plus de 150 exceptions dont un tiers à Rennes, 4 à Nantes, et les autres originaires de 55 villes
et paroisses.
La résolution de la Révolte est aussi judiciaire. En juillet 1675, les Insurgés de vingt paroisses de Scaër à Berrien, avaient assiégé et pillé le château du Kergoët, en Saint-Hernin, près de
Carhaix. Le propriétaire, Le Moyne de Trévigny, seigneur du Kergoët, était réputé lié à ceux qui avaient amené en Bretagne les impôts du timbre et du tabac. Une transaction entre les paroisses et
Le Moyne de Trévigny est approuvée par les états de Bretagne en octobre 1679.
En août 1675, sept habitants de Plomeur sont mandatés pour traiter avec Monsieur du Haffont pour le dédommager du pillage de son manoir situé à Plonéour-Lanvern. La transaction aboutit à un
accord devant notaire. Un accord semblable est passé avec les habitants de Treffiagat. En juin 1676, les sommes dues sont réduites de moitié. Le mois suivant, des habitants de Plonéour-Lanvern et
de Plobannalec sont mis en demeure de fournir 8 tonneaux de grains pour remplacer le blé pillé. En 1692, le fils de Monsieur du Haffont, décédé entre-temps, se plaint de n'avoir toujours pas reçu
un sou de dédommagement. D'autres contentieux de ce type traîneront devant les tribunaux jusqu'en 1710 au moins. En effet, la Bretagne entière est ruinée en 1679 par l'occupation
militaire.
L’ampleur de la Révolte est exceptionnelle pour le règne de Louis XIV : ce qui se passe est tout bonnement
inouï dans le contexte de l'époque. Concevables à l'époque de Louis XIII, les événements ne le sont plus depuis l'arrivée au pouvoir de Louis XIV, et restent d'ailleurs absolument uniques, à
l'échelle du royaume, entre la Fronde et 1789, si l'on excepte bien entendu le cas très particulier des camisards cévenols.
Durant le règne de Louis XIV, c’est la Révolte où les autorités locales ont le plus laissé faire les Emeutiers. Ceux-ci sont certes spontanés, mais s’organisent rapidement, et rallient des
groupes de plus en plus larges au sein de la société. À coté du pillage, on observe, ce qui est singulier, des prises d’otages et la rédaction de revendications.
La colère des paysans Révoltés se tournent contre les nobles pour deux raisons : ils constituent pendant longtemps la seule force de maintien de l'ordre disponible dans les campagnes, et leurs
châteaux servent de cibles, faute d'agents du fisc.
La Révolte de 1675 est aussi un épisode de la Lutte des classes : on peut rapprocher « les passions mauvaises, les idées extrêmes et Subversives qui fermentent nécessairement dans toutes les
masses Révoltées » qui en arrivent « au communisme et aux violences contre les prêtres », aux événements survenus durant la Commune de Paris en citant le curé de Plestin : « Les paysans se
croyaient tout permis, réputaient tout les biens communs, et ne respectaient même plus leurs prêtres ». On peut ainsi élargir les causes à une Révolte contre les prélèvements des seigneurs
fonciers (nobles et ordres religieux).
On peut tout autant parler d'asservissement national et de Lutte de Libération nationale des Bretons, étant donné que la noblesse bretonne s'était déjà entièrement francisée et que, au fond,
seuls demeuraient Bretons les paysans. En dépit d'une dénationalisation continue d'une partie des Bretons, ce problème demeure typique des « minorités nationales » et ne saurait être résolu dans
les conditions d'un régime centralisé. De plus, on peut lier la Révolte aux différences de l’économie bretonne, maritime et ouverte au commerce, et de l’économie française, aux intérêts
continentaux.
La Révolte est un affrontement entre la bourgeoisie et ses alliés d'une part, l'Ancien Régime d'autre part, comme lors de la Révolution française, à une échelle différente. La pression en faveur
du changement est modeste en Bretagne, et l'originalité de la situation de la province l'isole de toute manière dans le vaste royaume de France : il n'y a d'ailleurs pas ailleurs l'équivalent des
Révoltes de 1675.
Outre la réduction au silence des états et du parlement, la reprise en main permet également l’établissement
d’une Intendance de Bretagne (la Bretagne était la dernière province à ne pas connaître cette institution représentante du pouvoir central) que les états de Bretagne avaient jusqu'alors toujours
réussi à éviter.
En Basse-Bretagne, les zones Révoltées sont aussi celles qui furent favorables aux Bleus lors de la Révolution française, et qui virent la crise la plus importante des vocations religieuses au
XIXè siècle. Elles correspondent également aux zones du « communisme rural breton », ainsi qu'aux zones où la langue bretonne est la plus vivante.
En décembre 2005, le préfet du Finistère refusa l'installation d'un panneau touristique présentant la ville de Carhaix, sur le bord de la route nationale, au motif qu’il s’y trouvait la
représentation d'un Insurgé de la Révolte des Bonnets rouges.
A l’opposé de la France, l’Angleterre accepte la contradiction et la limitation du pouvoir royal.
Après la mort du roi Charles II, la situation politique et religieuse en Angleterre s’envenime. Le catholique Jacques II, qui succède à son frère Charles II en 1685, s’aliène rapidement l’opinion
publique par des mesures impopulaires. L’immense majorité des Anglais ne peuvent admettre que le roi tente de replacer l’église d’Angleterre dans le giron catholique. De plus, la bourgeoisie est
violemment hostile à toute tentative de restaurer le pouvoir absolutiste. Elle juge inadmissible que le roi dispense certains de ses sujets de l’obéissance au Bill of Test (exclusion des
non-anglicans de toute fonction administrative ou militaire) et qu’il se proclame lui-même au-dessus de la loi. Les jours de Jacques II sont comptés puisqu’une Révolution va mettre fin à son
règne. Cette Révolution est surnommée la « Glorious Revolution », car elle n’engendre pratiquement pas de violence. Les opposants au roi demandent au protestant Guillaume d’Orange de s’emparer de
la couronne. Lorsque celui-ci débarque à Torkay avec une armée anglo-hollandaise le 5 novembre 1688, Jacques II se réfugie en France auprès de Louis XIV. En janvier, le parlement déclare le trône
vacant. Il l’offre à Guillaume et à son épouse Marie Stuart, à la condition qu’ils jurent de respecter la Déclaration des Droits. Il s’agit d’un texte qui résume les Droits reconnus aux Anglais
et selon lequel le souverain ne peut établir l’absolutisme. Ainsi, il est interdit au roi de suspendre des lois, d’empêcher leur exécution et d’ériger une juridiction d’exception. Il ne peut pas
non plus percevoir d’argent ou entretenir une armée sans le consentement du parlement (d’ailleurs l’armée permanente est interdite en tant de Paix). Cette Révolution sans effusion de sang est
un
succès : elle assure la souveraineté au parlement et la prospérité en Angleterre. L’institution du régime constitutionnel est une victoire du parlementarisme sur l’absolutisme.